top of page
2_édité.png
5_édité.png
AdobeStock_440299419_edited.jpg

Quand la migraine fait du travail un défi

Le réveil sonne à 7 heures du matin, mais dès le premier clignement des yeux, vous le sentez : la douleur familière derrière le front s’annonce. Encore une de ces journées où la lumière du bureau sera trop vive, chaque appel téléphonique résonnera comme un coup de marteau, et vous vous demanderez comment tenir les huit prochaines heures… Vous n’êtes pas seul·e !

La migraine ne se manifeste pas comme une jambe cassée ni comme un plâtre – elle reste invisible pour les autres. Mais ses répercussions sur votre quotidien professionnel n’en sont que plus tangibles. Des études montrent que, lors d’une crise, les personnes concernées éprouvent des difficultés à se concentrer et peuvent souffrir de troubles de la perception. En tant que salarié·e, vous connaissez bien ces moments : l’écran vacille devant vos yeux, les conversations paraissent étouffées, et même les tâches les plus simples exigent un effort immense.

Les limitations cognitives vont bien au-delà de simples maux de tête. Des chercheur·euse·s ont démontré que la migraine peut entraîner des troubles de l’attention et de la concentration, de la mémoire à court et à long terme ainsi que de la prise de décision. Ces moments de « brouillard cérébral » rendent presque impossible de maintenir sa performance habituelle.

Pris·e entre présentéisme et absentéisme

Nombre de personnes migraineuses se trouvent face à un dilemme douloureux : doivent-elles se déclarer malades au risque d’être perçues comme peu fiables, ou bien se traîner au travail et tenter de fonctionner malgré la douleur ? Ce choix s’avère particulièrement difficile lorsque collègues ou supérieur·e·s ne comprennent pas la maladie.

Le fameux présentéisme – travailler malgré la maladie – est très répandu chez les personnes migraineuses. Elles se rendent au bureau alors qu’elles ne peuvent fournir qu’environ la moitié de leurs capacités habituelles. La peur des conséquences négatives, la culpabilité ou la pression de ne pas manquer des projets importants poussent beaucoup d’entre elles à dépasser leurs limites.

Dans le même temps, les crises entraînent inévitablement des absences. Ces arrêts imprévisibles peuvent perturber les plannings de projet et alourdir la charge du reste de l’équipe. L’incertitude liée au moment où surviendra la prochaine attaque complique toute planification à long terme et intensifie le stress – lequel peut, à son tour, favoriser de nouvelles crises.

La double charge émotionnelle

Au-delà des douleurs physiques, les personnes migraineuses supportent un lourd fardeau émotionnel. La crainte constante d’une prochaine attaque, la peur des répercussions professionnelles et le sentiment de ne pas être à la hauteur génèrent un stress chronique.

Particulièrement pesante est la stigmatisation encore très répandue. Beaucoup rapportent des commentaires tels que « ne fais pas ta chochotte » ou « prends donc une pilule ». Ce manque de reconnaissance explique que 43% des personnes concernées taisent leur migraine sur leur lieu de travail, ce qui accroît encore leur malaise psychologique.


Il en résulte souvent un cercle vicieux : le stress et la charge émotionnelle peuvent déclencher de nouvelles crises, ce qui alimente à son tour inquiétudes et angoisses. Les études montrent que les personnes migraineuses présentent un risque accru de dépression et de troubles anxieux.

Quand le lieu de travail devient déclencheur

Ironie du sort, l’environnement professionnel lui-même peut devenir un déclencheur. Écrans qui scintillent, néons agressifs, bruit en open space, odeurs fortes ou mauvaise posture – tous ces facteurs peuvent provoquer des crises chez les personnes sensibles.

Les métiers impliquant des horaires irréguliers, une forte interaction avec les clients ou une pression temporelle élevée représentent un défi particulier. Le travail posté perturbe le rythme biologique et augmente la fréquence des crises, tandis que les interruptions constantes et le multitâche surchargent un système nerveux déjà fragilisé.

Le jeu de cache-cache avec une maladie invisible

Beaucoup de personnes migraineuses mènent une véritable double vie au travail. Elles apprennent à cacher leur douleur, développent des stratégies pour fonctionner malgré les crises, et inventent parfois d’autres explications à leurs absences. Ce jeu de dissimulation permanent consomme une énergie supplémentaire et accentue le sentiment d’isolement.


Certain·e·s témoignent que l’effort pour cacher leur migraine provoque, paradoxalement, une plus grande perte d’efficacité. La tension constante et la peur d’être découvert·e aggravent les symptômes et déclenchent de nouvelles crises.

Entre rêves de carrière et limites de santé

Pour beaucoup, la migraine impose de lourdes décisions quant à leur trajectoire professionnelle. Certain·e·s renoncent à des promotions par crainte de ne pouvoir gérer davantage de stress. D’autres optent pour des postes moins exigeants ou réduisent leur temps de travail. Ce qui rend ces renoncements particulièrement frustrants, c’est qu’ils ne résultent pas d’un manque de compétence ou de motivation, mais de la crainte liée à l’imprévisibilité de la maladie.

La force de l’adaptabilité

Malgré ces obstacles, de nombreuses personnes migraineuses développent des compétences remarquables, qui deviennent de véritables atouts professionnels. Habituées à composer quotidiennement avec des crises imprévisibles, elles apprennent à travailler avec une grande efficacité lorsqu’elles sont sans symptômes. Cette nécessité de gérer un temps limité forge des compétences organisationnelles exceptionnelles et une forte discipline.

Elles acquièrent une capacité particulière à hiérarchiser les priorités, à communiquer efficacement et à trouver des solutions créatives à des problèmes complexes. Elles sont littéralement entraînées à surmonter les obstacles – une aptitude affinée par des années de gestion d’une condition fluctuante.


De la contrainte de tirer parti des jours sans migraine naît une reconnaissance de ces moments de bien-être, que d’autres considèrent comme acquis. Cette résilience et cette adaptabilité constituent des qualités inestimables dans le monde du travail – même si elles passent souvent inaperçues, puisqu’elles proviennent de l’expérience invisible d’une maladie, elle-même invisible.

Une voie vers l’avenir : sensibilisation et soutien

« La migraine au travail » est un ensemble complexe mêlant symptômes physiques, charges émotionnelles, défis sociaux et préoccupations professionnelles. Si, en tant que personne concernée, vous trouvez le courage de parler de votre situation et de vos éventuels déclencheurs, et si les employeurs acceptent de faire preuve de compréhension et de chercher ensemble des solutions pratiques, il est possible de mener une carrière réussie et épanouissante, malgré la migraine.

bottom of page